Entrevista    Francia
28 de febrero de 2022

Est-il pertinent ou non de revenir aux cours en présentiel ? Entretien avec Béatrice Perez Doyen de la Faculté des Lettres, Sorbonne Université

Por: UNAM-FRANCIA
Rentrée présentielle ou pas pour les étudiants? Ce qui convient à long terme.

La rentrée se fera en présence des étudiants, des enseignants, des personnels, de tous ceux qui font notre université, et c'est heureux.  

Notre université étant une université publique, responsable et soucieuse de la sécurité des étudiants, elle s'ajuste aux directives ministérielles qu'elle met en œuvre en les adaptant à notre réalité de sites et aux nécessités pédagogiques de nos formations. Il ne fait mystère pour personne que la période que nous avons vécue a été d’une violence inouïe pour tous, étudiants, personnels et tout bonnement, hommes et femmes dans leur quotidien de vie sociale, d’échanges, de relations qui font la vie. Nos étudiants et étudiantes, nos personnels, ont été d’un courage exemplaire, car il a fallu s’adapter sans cesse, en des temps très brefs, et faire face à la solitude de la recherche et du travail. À la Faculté des Lettres, il est vrai que la recherche souvent se fait en bibliothèque ou en archives, dans une forme de concentration qui permet de « rentrer en soi » pour s’abymer dans une connaissance qui est une découverte de l’esprit. Il y a toujours une forme de repli pendant ces temps de concentration. Mais cela ne signifie jamais ni solitude, ni isolement, ni enfermement. Le temps des « thèses en chambre » est désormais caduc. Nos étudiants sont des esprits « inquiets », sans cesse en mouvement, dans les bibliothèques, dans les archives, dans les musées, aux aguets de toutes les manifestations culturelles et scientifiques. Ils sont d’une richesse et d’une ductilité qui forcent l’admiration.


Imagen Sorbonne Université

La période pandémique que nous venons de vivre (et hélas que nous vivons encore) a mis au jour cruellement cette détresse de l’isolement que beaucoup ont connue. Et il en est allé de même pour nous, enseignantes et enseignants, parce que le sens même de nos recherche, de notre engagement s’est trouvé ébranlé par cette « absence » de liens concrets, quotidiens, avec les étudiants. Quoi qu’on en dise, l’écran jamais ne remplacera l’échange, le regard, le rire, la présence tout simplement de l’enseignant, de l’étudiant, de l’autre qui fait humanité et universitas. 

Ce qui convient à long terme ?
Vous l’avez donc deviné. Le cours en présentiel, encore et encore et toujours, sans oblitérer le recours aux médias, aux nouvelles formes informatiques, au mélange des genres, aux zoom, au distanciel (qui nous rendent de fiers services).

Comment adapter la stratégie internationale de la Faculté des Lettres de SU au temps de la pandémie et la post-pandémie?

Je crois qu’en tant que vice-doyenne des Relations Internationales, la pandémie fut un choc réfracté, car outre le traumatisme pour tous, il a fallu mettre le monde dans son écran comme si de rien...  

« Ah ! que le monde est grand à la clarté des lampes ! 
Aux yeux du souvenir que le monde est petit ! »  

disait Baudelaire. Eh bien pas un jour, je ne l’ai ressenti et éprouvé physiquement. 
Mais pour autant, et en dépit de ce que l’on pourrait croire, jamais l’international n’a été aussi présent dans le discours, dans les requêtes, dans les projets, comme désir, comme horizon heureux, comme réalité de la recherche sous toutes ses formes. Comment eût-il pu en être autrement en vérité ? 

Nos recherches sont intrinsèquement liées à l’international, parce que nous travaillons avec nos collègues pour toutes les UFR de Langues et Civilisations étrangères, d’histoire, mais pareillement de sciences. Les projets entamés ne pouvaient pas stopper net. Au contraire, le choc de cet immobilisme forcé, de ce confinement physiquement est allé de pair avec une ouverture vitale au monde, comme un besoin des autres. Et puis, la pandémie a montré que nous étions, malgré les peurs et les recroquevillements de certains funestes prédicateurs politiques, liés les uns aux autres, des hommes et des femmes universels. C’est vieux comme le monde, et parfois il semble que certains l’oublient. Sur les grands enjeux sociétaux, il ne peut y avoir d’avancées scientifiques sans coopération internationale. C’est cette réalité qui a donné sens à l’international dans notre faculté. Nous avons préparé l’après, nous l’avons rêvé aux quatre coins du monde, en préparant le mois du Mexique, en organisant la chaire d’excellence UNAM/SU, en établissant un accord avec l’université de Buenos Aires, en continuant de travailler à la construction de cette belle université européenne qu’est 4EU+. Nous avons tous été portés, presque comme mus par un principe de vie intellectuelle, vers l’échange international, dans la construction de modules en ligne, de cours ouverts à l’autre, de cycles de conférences avec nos partenaires d’Indiana et de la UNAM. Jamais nous ne nous sommes sentis si proches de Laval que depuis que nous avons organisé des réunions et des échanges thématiques de recherche (entre philosophes, humanités biomédicales, collèges des langues anciennes).  

Désormais – sans renier l’atout que représente le distanciel pour tout ce qui est le labeur invisible en amont, celui qui épuise mais qui fait la réussite et l’éclat des rencontres en présence –, il faut reprendre la mobilité. Pour des étudiants, pour nos collègues, rien jamais ne peut remplacer la connaissance de la culture de l’autre que la vie ailleurs, dans le pays qui n’est plus tout à fait étranger et devient le nôtre au gré de nos séjours. On n’est pas hispaniste ni italianiste ni historien du concile de Trente sans avoir traîné ses guêtres sur les chemins des deux péninsules, suivant les traces de ceux qu’on étudie en bibliothèques et qui d’un coup, prennent corps dans un environnement qui leur donne leur épaisseur historique.  
 
L’adaptation a été facile à la Faculté des Lettres ; c’est presque une provocation de le dire tant nous avons souffert de ne pas pouvoir nous déplacer ! Mais c’est vrai. Dans notre faculté, l’international est consubstantiel à nos cours, à nos recherches, à notre formation, à ce que nous sommes. Les humanités sont, par antonomase, ce qui ne s’acquiert qu’avec le temps, presque blanchis sous le harnois, alors, nous attendons de repartir avec un enthousiasme décuplé et un sens plus grand encore de l’efficacité et de l’appétence.
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